Protection de la petite

Protection de la petite enfance : la pouponnière, un lieu d’accueil en lien étroit avec l’activité judiciaire et sociale

SOCIAL - Vous êtes sans doute déjà passés à côté de la pouponnière Le Patio située depuis 2002 rue Caïs de Pierlas à Nice, un lieu dont la fonction nourrit son lot d’idées reçues. Cette pouponnière à caractère social nous a ouvert ses portes.
Une pouponnière à caractère social est amenée à accueillir des enfants de la naissance et jusqu’à 3 ans, dont la santé ne nécessite pas de soins médicaux.

Pour la majorité des cas, il s’agit d’un accueil judiciaire, lorsque le Juge des enfants prend une décision de placement. Dans une moindre mesure, l’accueil se fait sur un mode administratif, sous la forme d’un contrat passé entre les parents qui acceptent un soutien et le Conseil Général des Alpes-Maritimes via l’aide sociale de l’enfance. La pouponnière peut aussi accueillir des pupilles de l’Etat. « Toutes les situations sont différentes », commente Muriel Dovera, la Directrice du Patio. « C’est un véritable travail de précision que nous faisons : nous sommes de fermes défenseurs des droits de l’enfant et nous apportons un soutien à la parentalité, de façon individualisée. »

Idée reçue n°1 : la pouponnière accueille des enfants abandonnés

Mme Dovera : « c’est une idée reçue, les enfants en pouponnière ont des parents reconnus et qui défendent leurs droits. Pour donner un ordre d’idées, on compte dans les Alpes-Maritimes chaque année une dizaine d’enfants qui naissent « sous x » : c’est une minorité.
Nous sommes là pour évaluer et favoriser la qualité des liens entre les parents et l’enfant. L’important, c’est la relation et les besoins fondamentaux de l’enfant. Il faut une mère « suffisamment bonne », dans le sens donné par Donald Winnicott, c’est-à-dire une mère adaptée, qui saura y faire avec son bébé »
On compte deux pouponnières à caractère social dans notre département – la seconde étant située à Cannes – mais malgré cela, la capacité d’accueil reste en flux tendu. La pouponnière Le Patio est gérée administrativement par la Fondation Lenval et dépend des subventions du Conseil Général des Alpes-Maritimes. Elle recense 36 places en accueil temps plein à la pouponnière, 12 places pour les enfants en famille d’accueil suivies par le Service d’Accompagnement Familial Renforcé (SAFR) et 6 enfants en accueil de jour.

« Nous avons créé le SAFR pour accompagner les familles. Cela concerne souvent des situations où les enfants ont d’abord été placés à la pouponnière et ont besoin ensuite d’un suivi lors d’un placement en famille d’accueil (grande prématurité chez l’enfant, syndrome de sevrage, maltraitance, trouble de l’attachement, retard de développement, pathologies somatiques avérées, couplés ou non avec des parents qui ont une pathologie psychiatrique, conduite addictive, violence conjugale, incarcération, etc.). Il faut vraiment protéger et accompagner la famille d’accueil en soutenant le placement, ce qui réduit considérablement le nombre d’échecs », nous explique Mme Dovera.

« L’accueil de jour est quant à lui proposé lors de situations qui ont bien évolué, lorsque l’on s’oriente vers un retour en famille mais qu’il y a encore besoin d’un cadre. Cela peut aussi concerner des situations venant de l’extérieur, lorsque les travailleurs sociaux estiment qu’il s’agit de cas difficiles mais qui ne nécessitent pas une séparation en pouponnière nuit et jour ».

Idée reçue n°2 : les enfants en pouponnière sont ensuite placés en famille d’accueil jusqu’à leur majorité

Muriel Dovera : « La situation des familles est revue tous les 6 mois à 1 an par le Juge. Le placement en famille d’accueil est bien une situation temporaire. On ne parle pas ici d’adoption. Nous agissons tous dans le même sens et travaillons sur le potentiel des parents pour que les enfants puissent réintégrer à terme leur propre famille ». D’un point de vue légal, les parents conservent leur « autorité parentale ». Environ 1/3 des enfants retournent dans leur famille d’origine à l’issue de l’accueil en pouponnière.

Pour chaque situation, une équipe pluridisciplinaire intervient : les auxiliaires de puériculture gèrent le quotidien, l’éveil, les activités des enfants…
L’équipe technique est composée d’une puéricultrice, d’un psychologue et d’un éducateur de jeunes enfants. Ils connaissent bien la situation de l’enfant, font le lien avec les travailleurs sociaux (chaque enfant dépendant d’une Maison des Solidarités). L’un des professionnels de l’équipe technique est présent lors des visites médiatisées parents/enfant à la pouponnière.

Pédiatre et psychomotriciennes veillent également au bon développement de l’enfant.
La directrice et son adjointe se chargent de la formalisation du cadre (recevoir les parents avant les audiences au Tribunal et participations aux audiences).

Idée reçue n° 3 : les parents concernés par le placement de leur enfant sont en marge du système

Muriel Dovera : « ce n’est pas toujours le cas. Nous nous retrouvons assez dépourvus dans les cas de « bébés secoués », car nous sommes souvent face à des personnes tout à fait capables de s’occuper de leur enfant, de travailler, etc. Il y a eu un moment où tout a basculé pour eux et qui aboutit sur une procédure pénale. Ces situations délicates arrivent encore malheureusement trop souvent »
A ce jour, 70 personnes travaillent sur les deux structures dirigées par Mme Dovera : Le Patio où se trouve la pouponnière et Les Feuillantines regroupant le SAFR et l’accueil de jour.
D’ici un mois, une restructuration due à une demande de restriction budgétaire de la part du Conseil Général, fera se regrouper l’ensemble de ces services rue Caïs de Pierlas. « Nous allons faire de l’espace tant que possible mais ce n’est pas facile, c’est une période qui va être sensible », nous confie la Directrice.

Renforcer la prévention, améliorer le dispositif d’alerte et de signalement, diversifier les modes d’intervention auprès des enfants et de leur famille : la loi du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance place véritablement l’intérêt de l’enfant au cœur du dispositif. Elle a aussi pour ambition de renouveler les relations avec les familles. Ces objectifs trouvent une réelle corrélation sur le terrain, avec le maillage de fond constitué par les acteurs du social et du monde de la justice. Leur travail quotidien essentiel méritait d’être souligné.

Photo de Une Photo de Une : Vue entrée La pouponnière ©CM

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