Le Messie et les lanternes
- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 7 juin 2024
Depuis la disparition des cochers, des porteurs d’eau et autres allumeurs de réverbères, on sait bien que les métiers sont périssables. Avec l’inéluctable évolution des techniques, ceux cités en exemple ont été remplacés par les chauffeurs Uber, par les robinets, et par le réseau électrique, sans que personne aujourd’hui, à part quelques poètes peut-être, ne les regrettent vraiment.
L’intelligence artificielle bouscule déjà nos professions avec une force et une rapidité incroyables. Encore inconnue, hormis des spécialistes, il y a deux ou trois ans, elle s’invite déjà dans la pratique des avocats, des professeurs, des journalistes... et de bien d’autres fonctions qu’elle devrait rapidement dépasser à défaut de les remplacer totalement.
Certes, tout n’est pas encore au point : l’IA de Google destinée à concurrencer ChatGPT répond ainsi sans sourciller à la question idiote « y-a-t-il des chats sur la lune ? » que, « oui bien sûr, d’ailleurs les astronautes les ont caressés » lors de leur exploration de notre satellite. D’autres réponses toutes aussi farfelues sont assénées sur un ton sérieux, comme la recommandation de mettre de la colle dans les pizzas (mais où l’IA va-t-elle chercher tout ça ?). Artificielle, c’est sûr. Intelligente, cela reste encore à prouver. Car si elle agrège à la vitesse de l’éclair la masse phénoménale des « informations » véhiculées sur internet, elle n’est encore pas capable de séparer dans ce fleuve le bon grain de l’ivraie. Un jour, sûrement, elle pourra identifier les sources fiables. Pour le moment, elle présente encore parfois des vessies pour des lanternes, et pour un peu, elle serait bien capable de nous suggérer de soigner le Covid par de l’Hydroxychloroquine.
On pourrait aussi demander à l’IA de « pondre » un édito hebdomadaire sur un thème d’actualité choisi, ce qui serait finalement bénéfique aux ventes de cannes à pêche et de transats. Mais aux Petites Affiches, on préfère le fait main. Avec toutes ses imperfections humaines éventuelles, qui en font la saveur…
À force de battre nos propres records, cela devait finir par arriver : Standard and Poor’s a donc baissé la « note » de la France, doutant de ses capacités à revenir sous la barre des 3 % de déficit annuel considérée comme raisonnable et signature d’une bonne gestion. Bien sûr, les crises du Covid et la guerre en Ukraine n’ont pas épargné nos finances ces dernières années, pas plus que celles de nos voisins, qui font pourtant mieux que nous devant les mêmes difficultés. Il reste à espérer que ce « AA- » attribué par des spécialistes indépendants n’aura pas trop d’impact sur le montant des remboursements à venir pour ne pas alourdir une barque déjà bien chargée. Nous n’avons pas fini de ramer…
Nonobstant ses démêlés peu reluisants avec la justice et le fait qu’il a été reconnu coupable d’une trentaine de chefs d’inculpation par un jury populaire, Donald Trump peut toujours compter sur le soutien des milliardaires américains qui ne se cachent pas pour supporter le candidat aux sens civique et démocratique atrophiés. L’Amérique d’aujourd’hui s’éloigne des rêves que John Fitzgerald Kennedy et Martin Luther King nourrissaient pour leur pays…
J.-M. CHEVALIER