Edito - On ne mériterait pas mieux ?
- Par Jean-Michel Chevalier --
- le 29 juin 2024
Il s’avère que les élections européennes auront peut-être à l’avenir des « conséquences européennes » comme l’expliquait Emmanuel Macron avant le scrutin. Mais d’évidence, et sans attendre, elles en ont déjà de lourdes ici chez nous.
À quelques heures du premier tour, il serait vain de tenter de faire un point de situation politique du pays tant chaque journée apporte son lot de nouveautés, de surprises, de divisions. Une sorte d’hystérie généralisée s’est emparée des partis politiques. Selon leurs résultats électoraux, ils sont ceux qui ont le plus à gagner et à perdre dans l’aventure qui nous est promise après le 7 juillet, même si l’addition finale sera réglée par le contribuable. L’ambiance du moment me fait penser à l’album d’Astérix « La Zizanie », mais en moins drôle.
Que le pays se livre à l’extrême droite, qu’il ne réussisse pas à donner une majorité à un groupe, c’est un saut vers l’inconnu qui nous attend. Ce n’est guère rassurant.
À en juger par le nombre élevé des procurations, les Français sont mobilisés pour cette élection. C’est d’autant plus méritoire et paradoxal qu’il a été peu question de programme et de propositions pour les grands sujets du moment (dette, transition énergétique, pouvoir d’achat, politique extérieure, paix en Europe). L’on a assisté en direct au triste spectacle d’un « je t’aime moi non plus » entre adversaires droite-gauche mais aussi entre ex-alliés à l’intérieur de chaque camp.
Divorces consommés dans la douleur. Accords express pour réconcilier ceux qui étaient encore irréconciliables il y a deux mois. Accusations, récupérations diverses et embrouillaminis. Rien ne nous a été épargné. On a brûlé jadis des sorcières pour moins que cela.
Aujourd’hui, bien malin qui est capable de s’y retrouver dans cette confusion générale où l’anathème remplace l’argument, où l’on parle au nom des Français mais sans les consulter.
Nous mériterions mieux que cela. Car la situation est grave, exige de la hauteur, en tous cas plus que les intérêts à courte vue de partis et d’individus qui semblent davantage préoccupés à garder ou conquérir des prébendes qu’à redresser le pays et lui donner des perspectives d’avenir.
Même si une ancienne Première ministre (Édith Cresson) nous a appris que l’on pouvait n’en avoir « rien à cirer » de la bourse, celle-ci a déjà commencé à sanctionner les errances françaises. Des capitaux partent vers des cieux plus stables et plus sécurisants que Paris. L’UE nous sanctionne pour ne pas redresser assez vite nos comptes de longue date en rouge vif. Le Premier ministre, quel qu’il soit, devra trouver au moins 20 milliards d’économies cette année, 50 en 2025. Les coupes budgétaires sont inévitables à défaut d’être indolores : ce sont des pans entiers de politiques publiques qui passeront à la trappe.
Derrière l’aridité des chiffres, il y a l’école, le logement, la justice, la sécurité, la santé, les aides sociales… Rien n’est acquis, les électeurs doivent en être conscients au moment de s’exprimer dans ce tohu-bohu.
Franchement, on ne mériterait pas mieux ?
Jean-Michel CHEVALIER