Urbanisation : Priorité à la ressource en eau
- Par Sébastien Guiné --
- le 9 août 2024
Le préfet des Alpes-Maritimes s’appuie sur « une petite révolution » : un document juridiquement contraignant pour les communes et pour les intercommunalités.
Pour Hugues Moutouh, il n’est pas possible de faire comme si rien ne s’était passé. La menace de sécheresse s’est éloignée cette année, contrairement à 2022 et 2023, grâce aux fortes précipitations du premier trimestre mais pour lui, « la sobriété reste de mise pour l’avenir ».
- Hugues Moutouh ©S.G
C’est ce qu’il assurait en avril et c’est avec ce même objectif qu’il a souhaité récemment établir un « Dire de l’État » pour demander « une meilleure prise en compte de l’état de la ressource en eau disponible pour tout nouveau projet d’urbanisation dans le département », selon un communiqué de la préfecture du 22 juillet. Un Dire de l’État peut être défini comme « les différents éléments d’expression de l’État à l’attention d’une collectivité territoriale dans le cadre de procédures de planification territoriale décentralisées », selon un document du ministère de l’Écologie datant de mai 2013. Le préfet, cité dans le communiqué, explique que « l’adoption de ce Dire de l’État, doté de la force juridique, constitue une petite révolution. Il s’agit de replacer la ressource en eau à la base de tout nouveau projet d’urbanisation. Grâce à ce nouveau document, on va améliorer la résilience de nos territoires face aux effets du changement climatique. La gestion de la ressource en eau constitue sans doute le plus grand défi que nos villes, petites et grandes, auront a ? relever dans les prochaines années. Par ce Dire de l’État (…) on a l’ambition tous ensemble de changer la donne dans les Alpes-Maritimes ».
« Attentes particulières »
Face au défi de la gestion de l’eau, Hugues Moutouh a, selon le communiqué de la préfecture, « exprimé des attentes particulières à l’endroit des présidents des Établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) et des maires du département afin que les projets d’urbanisation nouvelle soient conditionnés à la disponibilité de la ressource en eau. Désormais, l’urbanisation du territoire ne sera possible qu’à condition que celle-ci ne menace pas les ressources en eau et ce dans la durée. Ce Dire de l’État précise ainsi les différents attendus de l’État pour évaluer la bonne prise en compte de la disponibilité de la ressource en eau dans les documents d’urbanisme qui lui seront soumis ». Ce document sera « systématiquement communiqué de nouveau aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale qui engagent une procédure d’élaboration ou de révision de leur document de planification ». Et « la commission départementale de préservation des espaces naturels, agricoles et forestiers (CDPENAF) présidée par le préfet, qui examine les procédures d’évolution des documents de planification urbaine, intégrera dans les décisions qu’elle rend les dispositions » de ce document.
Quelle ressource en eau dans les Alpes-Maritimes ?
Il apparaît dans le Dire de l’État que si « le département est quasiment autonome pour son alimentation en eau », « les Alpes-Maritimes ont connu en 2022 et 2023 des sécheresses préoccupantes, lors desquelles le déficit pluviométrique est monté jusqu’à -40 à -60 % par rapport à la moyenne, soit le déficit le plus important jamais rencontré depuis le début des mesures en 1959 » et « la totalité des communes ont été concernées par des mesures de restriction ». Neuf communes ont même connu des coupures d’eau pendant l’été 2022. « Les travaux prospectifs nous montrent que de tels épisodes pourraient devenir communs les prochaines années en raison du dérèglement climatique : une baisse d’environ 30 % des débits des cours d’eau du département est ainsi attendu d’ici 2050, ainsi qu’une baisse drastique du manteau neigeux d’ici la fin du siècle », est-il ajouté dans le document.